A l'occasion de la sortie du 2ème album d'André Charbonneau, nous avons souhaité en savoir plus sur le guitariste angevin. Voici l'interview qu'il nous a accordée.
J’ai découvert le Flamenco tout près de chez moi, par un guitariste américain Drew Croon qui m'a donné mes premiers cours de guitare et à qui je rends hommage dans cet album. J'ai eu cette chance de le rencontrer et d'apprendre de ce grand artiste qui est malheureusement décédé en 2007. Il m'a un jour joué un morceau de flamenco et je me suis aussitôt dit : « Je veux savoir jouer ça ! » C'était un très bon guitariste au style vraiment personnel et compositeur de surcroît, ce qui m'a très vite incité à développer mon identité musicale.
Vous avez tout quitté pour le flamenco, comment avez-vous pris cette décision ?Je suis d'un tempérament passionné et je pratiquais déjà d'autres arts depuis tout jeune (les marionnettes, la prestidigitation), aussi quand j'ai senti qu'à la fois la guitare et le Flamenco me parlaient à ce point, je n'ai même pas réfléchi. J'ai d'abord appris tout ce que je pouvais en France, puis j'ai foncé en Andalousie, car j'ai très vite vu que c'était là qu'il fallait se rendre si on voulait vraiment maîtriser les choses à un niveau professionnel ! En plus c'était l'aventure !
Quels souvenirs gardez-vous de Cordoue, combien de temps y êtes-vous resté ?J'en garde de très beaux souvenirs, très poétiques, très sensibles...et parfois très agités aussi ! Des nuits entières de flamenco dans les patios, dans les peñas, au concours national, qui m’ont permis de voir pratiquement tous les plus grands artistes de l’époque. J’ai conscience que j’ai eu beaucoup de moments privilégiés… Cordoue est ma ville préférée en Andalousie. Il faut dire que mes séjours là-bas se sont toujours merveilleusement bien déroulés ! Nous y avons passé pas mal de temps sur une dizaine d’années ma femme et moi (elle pour la danse et moi la guitare !) avec des retours réguliers en France.! Et puis il y a là-bas des ambiances comme nulle part ailleurs !
Vous avez étudié avec Vicente Amigo et Paco Serrano qui ont tous deux été élèves de Merengue de Cordoba, pourquoi ne pas être directement allé avec Merengue ?Parce que je les ai rencontrés en premier ! Je venais participer au stage de Paco Peña (que je remercie au passage pour m'avoir vraiment encouragé à être professionnel) J'avais reçu une bourse du gouvernement espagnol après avoir présenté plusieurs toques de ma composition. A l'époque, il y avait un examen de passage ! ...et je vois deux gars dans la rue, plutôt blonds. Je cherchais mon chemin aux alentours de la Plaza del Potro. Je me suis dit, vu leur style, qu'ils étaient étrangers comme moi ! L'un d’eux était Vicente, qui m'a annoncé qu'il jouait le soir même dans le quartier ! Nous avons sympathisé... Je l'ai beaucoup côtoyé à cette époque... J'ai pris d'ailleurs pas mal de cours particuliers avec lui et appris énormément ! Ca se déroulait souvent chez ses parents ! C'était déjà un guitariste extraordinaire. J’étais là quand il a gagné le prestigieux concours de Cordoue. J'ai très bien connu aussi Paco Serrano, un type vraiment sympathique et excellent flamenquiste, qui jouait dans la peña juste en face de ma chambre. Il m’a véritablement appris l’accompagnement de la danse avec sa sœur Luisa, jeune danseuse talentueuse. J'ai passé des moments inoubliables auprès de ces artistes en devenir donc en pleine ébullition ! J'étais jeune et je m'amusais en apprenant ! Quel bonheur !
Pourquoi ce choix de la guitare seule pour votre nouvel album "Flamenco-Andalucia"?C'est comme ça que je l'ai découverte en Andalousie et comme ça que je l'aime ! J'adore ce défi de composer pour la guitare seule. Les contraintes que ça pose pour l'arrangement de mes airs m'ont permis petit à petit d'élaborer mon style. Je préfère l'adjonction d'autres instruments dans mes compositions pour la musique de films ou la chanson. Pour moi le flamenco, c'est vraiment l'art de la guitare soliste !
Quel a été le processus de création de ce second album ?J'ai ressenti très fort à un moment donné le besoin de refaire un album de guitare flamenco en solo après beaucoup de créations dans d'autres domaines musicaux. Très vite, plein de nouveaux thèmes me sont venus et j'ai concrétisé avec joie.
Pourquoi avoir mis tant de temps à le sortir après le premier album ?Après mon premier album, nous avons beaucoup tourné ma femme et moi en duo flamenco "Guadalquivir" musique et danse. J'ai composé des musiques pour des courts métrages et documentaires et tenté plusieurs concours de composition que j'ai remportés. En 2000, j'ai composé et édité 15 oeuvres pour guitare solo aux Productions d'Oz et je les ai enregistrées en 2003 dans mon album de guitare "Rien qu'un instant". J'ai aussi composé les musiques de plusieurs chansons pour Lauren pour notamment son dernier album "Sans compter"qui est sorti en 2010. Tout ça m'a permis de prendre un peu de distance, de renouveler mon inspiration dans mon Flamenco et de revenir plein d'entrain pour ce nouvel album.
Avez-vous déjà accompagné le chant ? Le chant ne vous a-t-il pas manqué dans le duo Guadalquivir ? Comment fonctionniez-vous sans le cante qui est tellement indispensable à cet art ? Est-ce un choix ou une contrainte de ne pas avoir inclus le cante ?Lors de mes nombreux séjours en Andalousie, j’ai eu plusieurs fois l’occasion d’accompagner le cante dans des peñas flamencas, mais je me suis surpris plus ému à l’écouter qu’à l’accompagner. Je suis aussi compositeur de musique pour les images et très cinéphile et j’ai donc naturellement considéré la danse comme un film qui se déroulait devant mes yeux. J’ai un style musical plutôt mélodique et imagé et la danse se créait à partir de mes thèmes.
Y aura-t-il une présentation de votre album sur scène, une tournée ?L’album est annoncé dans les médias : j’ai fait des interviews dans la presse régionale, mon producteur s’occupe du national et de l’international, et grâce à des sites comme le vôtre je le fais connaître aux aficionados.
Sur scène, j’ai créé un autre concept que celui de concert de guitare flamenca : j’ai développé un spectacle personnel autour du flamenco (anecdotes, participation du public, humour), avec des ouvertures vers d’autres univers (comme la magie, que je pratique depuis l’enfance). J’y joue aussi d’autres instruments en plus de la guitare (charango, cuatro, timple canarien…), d’où le titre « André Charbonneau joue et raconte le flamenco… et bien plus encore ! »
Où peut-on se procurer votre album ?L’album est disponible chez tous les disquaires : FNAC, Virgin, Espace culturel Leclerc, Boutique Harmonia Mundi, Chapitre, … ainsi qu’en téléchargement sur le Net. Il est distribué en Europe, aux USA, au Canada, au Japon, à Taiwan et Hong-Kong.